[Interview avec la Récupérathèque // Beaux-Art de Lyon]

Nous vous invitons à découvrir l’association La Récupérathèque, à l’initiative d’étudiant(e)s de l’ENSBA Lyon. Association active depuis septembre 2015, “La Récupérathèque est un magasin de réemploi de matériaux dédié principalement aux étudiants de l’école des Beaux-arts de Lyon, situé sur le site des Subsistances. Suite à plusieurs problématiques spatiales et économiques, l’alternative de la Récupérathèque est venu naturellement concrétiser et solidariser plusieurs initiatives tant du côté des élèves que du personnel.”

 

Est-ce que vous pouvez recontextualiser la création de l’association « La Récupérathèque » ?

Esther : Durant l’année 2014-2015, avec l’équipe des délégués, le conseil de la vie étudiante, le CA, on avait pas mal réfléchi aux problèmes de l’école, notamment celui des frais d’inscriptions qui avaient augmentés, en a résulté une AG, et le projet d’une matériauthèque a été évoqué. C’est quelque chose dont j’avais déjà entendu parler dans des écoles d’architectures. Du coup j’en ai reparlé durant un conseil de la vie étudiante, mais le projet n’a pas été vraiment bien compris. Mais en fait on croyait à tord que le terme matériauthèque correspondait à ce qu’on voulait. Par le biais d’une prof de design, Olivier a entendu parler de ce projet là, et nous nous sommes mis en lien pour taffer là-dessus, là c’était en printemps 2015. On a commencé à avoir une équipe et un nom pour « La Récupérathèque » en juin.

Olivier : Ca fait un petit moment que l’envie d’une récupérathèque se manifestait chez les étudiants, de la récupération se faisait déjà dans la benne. Nous on voulait juste structurer tout ça en proposant d’autres choix de matériaux que ceux de la benne. Du coup on a contacté des entreprises, des musées pour faire des partenariats pour récupérer des matériaux plutôt basiques, pas complexe. L’idée étant aussi de ne pas saturer l’espace de matériaux, pour ne pas qu’ils deviennent déchets. Avec ces partenariats, nous avions envie de palier le gaspillage de certaines entreprises pour le proposer aux étudiants qui ont besoin de matériaux d’assez bonne qualité. « La Récupérathèque » fonctionne avec une monnaie alternative, le grain. On obtient à l’adhésion une dizaine de grains, tous les matériaux sont vendus au poids, on a des coefficients qui correspondent à chaque matériau. Ils sont pesés, multipliés par le coefficient du matériau, par le poids et par un autre coefficient qui se définit par l’état du matériau, donc on a A B C D, qui comme ça dévalue le matériau en fonction de son état. Ca ça donne son prix en grains. Un étudiant pour gagner du grain peut rendre service à « La Récupérathèque », l’idée c’est que l’étudiant soit acteur de cette récupérathèque car même si nous sommes 14 dans le bureau, nous sommes vite dépassés et comme ça on peut payer des services en grain. Ils peuvent aussi nous donner des matériaux et nous les rachetons avec du grain. Il n’y a donc pas qu’un échange de matériaux mais aussi de services.

Pourquoi avoir choisi la forme de l’association ?

E : C’est un moyen de pérenniser « La Récupérathèque », on a choisi cette forme car c’est celle que nous connaissons le plus et qui est la plus pratique.

O : Oui à partir du moment où on fait des adhésions, qui sont à 5€, il nous fallait un compte en banque, et du coup un statut, donc une association, aussi basique que ça.

E : Après nous on garde de la distance avec ce système plutôt bureaucratique. On essaye d’être le plus horizontal possible, nous nous sommes placés en tant que Président et Vice-président sur le papier, en réalité dans le fonctionement de la Récupérathèque nous sommes co-représentants. L’idée est d’alléger au maximum ce système hiérarchique en se l’appropriant et en proposant plutôt aux adhérents et membres de l’association un système de confiance par la subdivision des tâches. Cela permet de créé un cycle dynamique, qui fait évoluer l’ensemble de l’association par l’ensemble de ses membres, au fur et à mesure de ce qu’elle entreprend.

En début d’année, j’avais vu que vous aviez fait appel au collectif Rotor pour intervenir au sein de la Récupérathèque, pouvez-vous m’en dire plus ?

O : J’ai fait mon mémoire sur le réemploi des matériaux et un des membres de Rotor m’avait accordé une interview. L’envie avec « La Récupérathèque » c’est d’avoir une grande part de sensibilisation, donc l’idée est de faire venir plus d’une fois par an des intervenants pour animer une conférence, un workshop ou les deux. On a eu un échange très intéressant avec « Rotor », et c’était l’occasion de leur parler de notre jeune association. Ils ont donné une conférence, ça a eu un très bon retour par les étudiants car pour une fois ce n’était pas un artiste qui venait parler de son travail, coupé du monde. Là au contraire c’était vraiment une personne ancrée dans le réel des problèmes sociétaux et environnementaux.

E : Après dans ce projet, nous avons cette volonté de transmission et de sensibilisation qui compte énormément, et qui passe par le réemploi de matériaux. Notre association s’est créée il n’y a pas longtemps, on aimerait avoir ce rythme d’au moins une conférence et un workshop par an. Ce qui ne nous empêche pas cependant d’envisager des workshops entre étudiants.

O : On a envie que « La Récupérathèque » soit un lieu de sociabilisation, où des étudiants qui n’ont pas l’occasion de se voir entre option puisse s’y rencontrer. Je pense que le réemploi peut être un liant entre les étudiants de différentes options.

E : Le réemploi a résolu des questions d’espaces, ne serait-ce que dans les couloirs ou les ateliers, en les désencombrant. Mais aussi « La Récupérathèque » est le seul endroit où toutes les années peuvent se rencontrer, sous prétexte d’échanger des matériaux, nous créons des liens sociaux entre les années, ce qui fait que d’un coup un étudiant en première année va se mettre à discuter avec un autre en quatre, et que des initiatives se rencontre où bien font parler d’elles.

Comment l’école vous soutient ?

E : C’était compliqué au début, nous avons monté un dossier très détaillé du projet au printemps 2015. Au début, nous voulions avoir un container, parce qu’on pensait que c’était mieux que ce qu’on a actuellement, et finalement ça ne s’est pas fait. L’administration nous a laissé nous installer dans la cave de l’école, c’était le capharnaüm mais petit à petit nous avons organisé notre espace. Le seul problème c’est que ce lieu n’est pas aux normes sécuritaires, ce qui rend notre aménagement illégal. L’administration de l’école voit que « La Récupérathèque » est une vraie dynamique dans l’école et n’a pas vraiment envie de nous déloger pour le moment.

O : Pour l’aménagement de la cave, l’enjeu est de la rendre la plus flexible possible en aménageant quand même des espaces dédiés à des catégories de matériaux qui se regroupent en fonction des pôles de l’école, nous avons des pôles bois, métal, édition, résine, céramique,… On tente de regrouper ces matériaux en fonction de leur destination future à savoir ces différents pôles. Nous devons mettre en place une signalétique assez claire, et il y a toute une réflexion autour de la présentation des matériaux, comment leur redonner de la valeur en les présentant correctement. C’est tout un système de classement qu’il faut penser, classer par usage potentiel, par famille de matériaux, par leur forme. On ne peut pas mettre tout le métal ensemble parce qu’il y a des plaques et des longues profilées qui ne vont juste pas ensemble… Voilà l’idée c’est un peu de faire avec cet endroit qui est une magnifique cave voutée et comment on range des matériaux de natures différentes là dedans.

Et comment voyez vous la suite de La Récupérathèque ?

O : Le projet continue l’année prochaine, l’idée c’est d’exporter le concept de « La Récupérathèque » pour que chaque école de création, plus que d’école d’art, puisse se réapproprier ce concept et l’implanter dans ces institutions qui en ont grandement besoin je pense, voilà ça c’est la suite du projet pour nous deux.

E : Vu que nous sommes les membres fondateurs, on veut d’abord que tout soit bien fixé sur ce projet, ce n’est que le début du coup on attend qu’il soit bien façonné et affiné avant de s’en détacher vraiment.

O : On est en train d’établir un travail qui est assez théorique pour le moment, « comment faire une récupérathèque » pour donner une bonne base pour les suivants, ceux qui voudraient reprendre le concept. Après ce qui fédère un bureau ce sont les envies de chacun. Nous on aimerait bien faire un calendrier sexy, un compost, organiser des sessions de réparations d’ordinateurs….

E : Effectivement c’est important de le dire je pense que chaque bureau fait son portrait de « La Récupérathèque ». Si le bureau contient plus de designers textiles, peut-être qu’une friperie sera organisée. Lorsqu’on dit avec Olivier qu’on sera là un peu de loin, c’est justement pour ne pas étouffer les envies et les désirs d’évolutions, de tendances de chaque bureau qui nous succèdera. Nous on est là pour définir un peu ce qu’est une récupérathèque, ses missions globales précises sans être restrictives, afin de pouvoir l’identifier.

 

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